mercredi 19 décembre 2018

Début décembre 2018 : La Libre Pensée devant les préfectures-Début 2019 : Manifestation nationale à Paris ?

A l’appel de la Fédération nationale de la Libre Pensée et des Fédérations départementales, plus de 90 initiatives, rassemblements et délégations en préfectures départementales ou de régions ont eu lieu autour des 7, 8 et 9 décembre. Des centaines de citoyens rassemblés à la Rochelle, à Angers ou Chambéry, 32 à Valence, 50 à Mont-de-Marsan, dans plus de 70 villes, les laïques et leurs associations étaient devant les préfectures pour dire :

Monsieur Macron

Ne touchez pas à la Loi de 1905 !

Préfecture de Quimper le 7/12/2018

Ainsi à Quimper, une cinquantaine de laïques était présente avec la Ligue des Droits de l’Homme départementale, l’Amicale laïque de Concarneau, Citoyens du Guil, l’ADMD et la LP29. A Albi, ce sont plus de 40 citoyens qui se sont réunis devant la préfecture, accompagnés des associations, syndicats et partis. Ils furent 50 présents à Vannes (Morbihan). A Privas (Ardèche), 45 personnes se sont retrouvées à proximité de la préfecture en présence de 150 gilets jaunes. A Valence (Drôme) une trentaine de citoyens se sont regroupés avec des représentants de la FOL 26, de l’observatoire de la Laïcité, la LDH, Sud-Education avec des Elus, dont un qui a pris la parole lors de la délégation au préfet. Il y a été rappelé « que la loi de Séparation des Églises et de l'État avait assuré 113 ans de paix civile. Les diverses déclarations d'Emmanuel Macron, qui s'est invité successivement au dîner de rupture du jeûne du Ramadan, au 500e anniversaire de la Réforme protestante, au dîner du CRIF et à la conférence des Évêques de France, ont alerté les laïques sur les menaces pesant sur la loi de 1905 ».



A Clermont-Ferrand, la LDH, la LP, appuyés par plus d’une trentaine de manifestants, ont été reçus en préfecture. 30 présents encore à Digne-les-Bains, à Creil, à Montpellier, 40 à Aurillac, à Tours. Par dizaine à Annecy, à Avignon, à Caen, à Reims, à Evry ou Pontoise, des militants étaient regroupés dans le même but. Pour les laïques et leurs associations, il n'y a rien à réparer, car depuis 1905 il n'y a plus de lien. Nous avons mis en garde le Gouvernement contre toute tentative de remettre en cause la loi de Séparation en voulant «organiser et labelliser » des cultes et en leur attribuant des financements publics.




A Grenoble, après un rassemblement où la Libre Pensée, la Ligue de l’enseignement, la Ligue des droits de l’Homme, la FSU et le Mouvement de la paix ont pris la parole devant des dizaines de citoyens, une délégation a été reçue.



Plus d’une trentaine de Fédérations de la Libre Pensée ont d’ores et déjà été reçues, une quinzaine sont en attente, une dizaine n’a toujours eu aucune réponse de la part des préfectures. Nous avons interpellé le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, et attendons encore sa réponse.



Les délégations qui ont été reçues ont « rappelé les raisons de notre attachement à la Loi, démontré que les modifications envisagées seraient la destruction de cette dernière et mettrait la République en danger et insisté sur le fait que notre arsenal juridique était largement suffisant pour permettre la coexistence de tous les citoyens et réprimer les appels à la haine ». Généralement, les représentants de l’Etat reconnaissent ces évidences, mais arguent d’un changement « technique ». Vous trouverez, le compte-rendu de la délégation avec deux représentants de la Libre Pensée de la région parisienne auprès du Préfet de la région d’Ile-de-France qui illustre notre propos et nos inquiétudes. 

 

COMPTE RENDU DE LA DÉLÉGATION AUPRÈS DU PRÉFET DE LA RÉGION D’ÎLE-DE-FRANCE

 7 DÉCEMBRE 2018



 À la suite du discours devant la Conférence des évêques de France par lequel le Président de la Républi ue a appelé à la « réparation » des liens « abîmés » -, alors qu’ils ont été simplement rompus - entre les cultes et l’État, conformément aussi aux décisions du congrès de Saint-Herblain de la Fédération nationale de la Libre Pensée (FNLP) et compte tenu, enfin, des informations annonçant une ample révision de la loi du 9 décembre 1905 concernant la Séparation des Églises et de l’État, les libres penseurs des départements de Paris, des Yvelines, des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne se sont rassemblés devant la préfecture de la région d’Île-de-France, le 7 décembre 2018. Le directeur de cabinet du préfet, M. Bruno André, et l’une de ses collaboratrices chargée des relations avec les cultes, Mme Fatima Japon, ont reçu une délégation composée de David Gozlan, Secrétaire général de la FNLP et Dominique Goussot, membre de sa commission administrative nationale. Le représentant de la Ligue de l’Enseignement a été empêché au dernier moment.

Après avoir remercié le directeur de cabinet, la délégation a d’abord précisé que de nombreuses manifestations similaires ont eu lieu sur l’ensemble du territoire national à l’initiative de la FNLP, qui n’a reçu aucune réponse à sa demande d’entrevue avec le Président de la République. Elle a déploré que plusieurs préfets aient refusé de recevoir les libres penseurs. Elle a rappelé que les informations circulant dans la presse indiquent notamment que le Gouvernement, dans le but essentiellement de mieux contrôler l’Islam en France (prêches, financements venant de l’étranger), entendrait instituer une procédure de quasi-agrément des associations cultuelles, renouvelable tous les cinq ans, qui reviendrait à dénaturer en partie l’article 2 de la loi du 9 décembre 1905 aux termes duquel l’État ne reconnaît pas les cultes.

Elle a précisé que les laïques n’accepteront pas une révision de la loi qui porterait sur un tiers de ses articles et introduirait, par leur ampleur et leur contenu, des modifications aussi profondes que celles issues de la loi du 25 décembre 1942 du Régime de Vichy. Enfin, après avoir rappelé que la loi, un texte fondamental de liberté voté au terme d’un débat parlementaire exceptionnel, offre aux autorités tous les moyens juridiques d’assurer l’ordre public dans les lieux de cultes, elle a insisté sur deux points, pris pour exemples.

D’une part, elle a critiqué l’élargissement envisagé aux « rénovations énergétiques » des aides allouées pour financer les « réparations » par les collectivités publiques des lieux de culte privés édifiés après 1905, sur le fondement du dernier alinéa de l’article 19 de la loi, introduit en 1942. D’autre part, elle a fait part de son étonnement devant la volonté du Gouvernement de permettre aux associations cultuelles de faire fructifier, en dehors de toute activité cultuelle, un patrimoine immobilier de rapport acquis gratuitement, alors même que la représentation nationale vient d’écarter l’essentiel de l’article 38 du projet de loi pour un État au service d’une société de confiance. À cet égard, elle a souligné que les recettes tirées de l’exploitation d’un tel patrimoine seront défiscalisées et que le dispositif envisagé conduirait à étendre les possibilités de recevoir des dons et legs ouvertes en 1942.  Il s’agirait alors d’un financement public par le biais détourné de la fiscalité, qui est une violation flagrante du principe de non-financement public (Article 2 de la loi de 1905).


Les interlocuteurs de la délégation ont répondu que leur niveau d’information était semblable au nôtre et qu’ils avaient simplement à cœur de recueillir nos remarques afin d’en informer le Bureau central des cultes du ministère de l’Intérieur. Ils ont insisté sur le fait que les réflexions actuelles du Gouvernement en étaient au stade d’un simple avant-projet, susceptible d’évoluer nettement au fil des débats et de la concertation qui devrait s’engager. Ils ont confirmé que les pouvoirs publics entendent trouver une solution au problème de la gouvernance de l’Islam en France. Le directeur de cabinet a implicitement reconnu que le Conseil français du culte musulman (CFCM) n’a pas apporté de solution satisfaisante à cette question et que la situation des relations nouées entre l’État, les collectivités publiques et ce culte variait trop d’un territoire à l’autre, faute de structure pyramidale solide. Il a précisé que ce sujet spécifique devrait s’articuler avec celui, plus général, de l’évolution probable de l’organisation territoriale de l’État.

Il a également souligné que les assises départementales de l’Islam, lancées au début de l’été par l’ancien ministre de l’Intérieur, M. Gérard Collomb, avaient mis en évidence la nécessité de répondre à deux autres questions : celle de la formation des imams et celle du financement, cette dernière étant pourtant commune à tous les cultes ainsi que la délégation l’a fait remarquer. À cet égard, il considère que l’extension des sources de financement des cultes au moyen d’un patrimoine immobilier de rapport acquis gratuitement devrait être indifférente aux libres penseurs et aux laïques en général, en tant qu’elle n’entraînerait aucune charge pour les collectivités publiques. Quant à elle, sa collaboratrice s’est voulue rassurante en indiquant que les articles 1 et 2 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la Séparation des Églises et de l’État, qui ne feraient l’objet d’aucune révision, étaient au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République (PFRLR) entrant dans le bloc de constitutionnalité.

Selon nous, s’il est exact que l’arrêt n° 77-87 DC du Conseil constitutionnel du 23 novembre 1977 inscrit la liberté de conscience parmi les PFRLR, en revanche, celui n° 2012-297 QPC du 21 février 2013, rendu à propos de la constitutionnalité de l'article VII des articles organiques des cultes protestants de la loi du 18 germinal an X relative à l'organisation des cultes, ne se prononce que sur la reconnaissance des cultes et le fait de salarier leurs ministres : «  […] la République ne reconnaît aucun culte ; […] qu'il [le principe de laïcité] implique que celle-ci ne salarie aucun culte ; »

Au terme de cette entrevue courtoise, nous maintenons nos exigences :

Séparation OUI ; Réparation NON !


Ne touchez pas à la loi de 1905 !



A Lyon, le représentant de la Ligue de l’enseignement a rappelé : « Dès avant 1905, la Ligue de l’enseignement s’est résolument engagée pour la Séparation des Églises et de l’État. Depuis l’adoption de la loi, nous nous sommes constamment mobilisés pour la défense de la liberté de conscience qu’elle assure. Cette liberté est fondamentale. Elle assure à chacune et à chacun le droit de se référer à la conviction philosophique ou à la religion de son choix. Elle garantit en conséquence le libre exercice des cultes. De même que la possibilité de changer de conviction ou de religion, et de critiquer ces mêmes religions et convictions. Les cultes ne bénéficient plus d’une reconnaissance sous forme de statut et de financement de droit public. Ils relèvent du droit privé, en particulier associatif. C’est de façon cohérente que, pour assurer cette liberté de conscience, la République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte ».



A Tours, le délégué de la Libre Pensée a expliqué : « "L’Etat maitre chez lui, l’Eglise chez elle", disait Victor Hugo. La séparation fait qu’il ne peut y avoir ni religion d’Etat, ni officielle, ni reconnue. On peut croire ou ne pas croire. Personne ne peut imposer quoi que ce soit. C’est la liberté de conscience affirmée dans l’article I de la loi de 1905. La religion est séparée de l’Etat. C’est l’article II qui stipule "la République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte". Cela signifie qu’il n’y a aucun financement public des cultes, la religion étant considérée comme une affaire privée. (…) L’Eglise n’a, en effet, jamais accepté la loi de 1905. Une des attaques, attaque majeure s’il en est, c’est celle du Régime de Vichy de l’ex-maréchal Pétain avec la loi de décembre 1942 qui a redonné les capacités civiles et testamentaires à l’Eglise, refaisant ainsi de celle-ci une puissance financière, immobilière, foncière, forestière. L’Eglise possède des bâtiments de grand luxe dans les arrondissements chics de Paris. Ces immeubles-là ne s’effondrent pas comme à Marseille. »



Dans l’ensemble des délégations, la tonalité des représentants de l’Etat est la même : « Il n’estt pas question de dénaturer la loi de 1905 qui est une loi fondamentale pour la République. Mais, cependant, concernant l’organisation de la religion musulmane et son éventuel financement par des pays étrangers », il faudrait de nouvelles règles. Dans l’ensemble des délégations, l’argumentation des représentants de l’Etat repose sur l’affirmation « que les modifications à venir ne seront que des modifications "techniques" », ne touchant pas à l’article 1 et 2 de la Loi de 1905. Derrière cet écran de fumée, il est annoncé « un avant-projet de loi » dont « le but, c’est de trouver des solutions pragmatiques ». Le questionnement tourne toujours autour de la même religion : L’Islam. « Cette réflexion sur "faut-il modifier ou non la loi de 1905" s’explique par la difficulté importante de réguler le culte musulman. Il n’est pas structuré comme les autres religions vis-à-vis de l’Etat et vis-à-vis d’eux-mêmes»



La régulation d’un culte par l’Etat, c’est déjà la fin de la loi de 1905. A quel titre un Etat régenterait un culte en lui interdisant de rentrer dans les affaires de l’Etat ? Et l’un des représentant de l’Etat a déclaré : « Il faut donc donner un cadre », avant de s’interroger sur : « faut-il renforcer le CFCM qui n’a pas répondu aux attentes ou le remplacer ? »



Pourquoi un million de pratiquants bouddhistes avec quatre millions de sympathisants se sont adaptés totalement à la Loi de 1905 et cela ne pourrait-il être possible pour un autre culte ? « Prétendre "prévenir les dérives intégristes" n'est qu'un prétexte, derrière lequel se profile la silhouette d'un nouveau concordat ».



Dernier point, ce qui a scandalisé nombre de délégations est que le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, consulte les cultes pour écrire cet avant-projet de Loi et qu’il n’a pas encore reçu la Libre Pensée (comme il l’a pourtant annoncé à la presse) et les associations laïques.



La Loi de 1905 vaut bien une mobilisation nationale




Depuis qu’il a été élu, le nouveau Président de la République visite es-qualité les réunions statutaires de certains cultes, et il a même déclaré lors d’une visite à la Conférence des Évêques de France au couvent des Bernardins le 9 Avril dernier vouloir « réparer le lien entre l’Église catholique et l’État », lien qui a été institutionnellement rompu en 1905.



Les délégations ont clairement rappelé que si Macron et le gouvernement persistaient dans leur volonté de modifier la loi de 1905, les laïques engageraient une mobilisation nationale.



Il n’y aura jamais assez d’actions pour défendre la loi de 1905. Il y a trop d’endroits où elle est bafouée et où il faut la défendre. Le maire de Béziers, Robert Ménard d’extrême-droite vient encore d’être condamné pour la mise en place d’une crèche catholique dans les bâtiments de la mairie, bâtiment de la République.



Chaque laïque le ressent : l’unité laïque est en marche, il faut la renforcer. Qui prendrait le risque de diviser les laïques et leurs associations en ne rejoignant pas l’appel lancé par 30 associations à l’initiative de la Ligue de l’Enseignement, appel auquel la Libre Pensée est partie prenante depuis sa conception et sa réalisation ?



Chacune des délégations a laissé un dossier complet aux représentants de l’Etat où il était explicitement indiqué :



NE TOUCHEZ PAS A LA LOI DE 1905 !



Paris, le 17 décembre 2018





UN APPEL DE 30 ORGANISATIONS LAÏQUES. NON À LA RÉVISION DE LA LOI DE 1905 !



Publié par l’Humanité - Mardi, 11 Décembre, 2018

Des projets de révision de la loi de 1905 seraient à l’étude. S’il s’agit de mieux encadrer des dérives intégristes mettant en cause les principes et valeurs de la République, le titre V de la loi, intitulé « Police des cultes », fournit l’arsenal juridique suffisant. S’il s’agit de financer les cultes de quelque manière que ce soit, on entrerait alors dans une procédure concordataire que la loi de 1905 avait précisément pour but d’abolir.

Les organisations laïques soussignées, réunies le jeudi 22 novembre 2018 à Paris, mettent en garde contre toute modification de la loi de séparation des Églises et de l’État du 9 décembre 1905, quelles qu’en soient les voies. Cette loi est un pilier fondamental de la République. Pour assurer à chaque citoyen la liberté de conscience, elle a instauré un juste équilibre entre la garantie du libre exercice des cultes et la neutralité confessionnelle de l’État.

Les organisations signataires rappellent donc solennellement l’intangibilité des principes solidairement posés par la loi :
Article 1. La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public.
Article 2. La République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte.
Les organisations laïques demandent, par-delà les débats inutiles que suscitent ces projets de révision, que soit déjà et complètement appliquée la loi.

Premières organisations signataires : Centre d’entraînement aux méthodes d’éducation active (Cemea), Conseil national des associations familiales laïques (Cnafal), Débats laïques, Égale, Fédération des autonomes de solidarité FAS-USU, Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE), Fédération française de l’ordre maçonnique mixte international « le Droit humain », Fédération de l’éducation de la recherche et de la culture (Ferc-CGT), Fédération générale des pupilles de l’enseignement public, Fédération générale des retraités de la fonction publique (FGR-FP), Fédération nationale de la Libre Pensée, Fédération syndicale unitaire (FSU), Francas, Grande Loge mixte de France (GLMF), Grande Loge mixte universelle (GLMU), Libres MarianneS (LMS), Ligue de l’enseignement, Ligue des droits de l’homme (LDH), Mouvement de la paix, Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (Mrap), Mutuelle générale de l’éducation nationale (Mgen), Solidarité laïque, Syndicat administration et intendance (SIA-Unsa), Syndicat de l’éducation populaire (Unsa), Syndicat des enseignants (SE-Unsa), Syndicat de l’inspection de l’éducation nationale (SI.EN Unsa éducation), Syndicat national Force ouvrière des lycées et collèges, Syndicat national des inspecteurs d’académie inspecteurs pédagogiques régionaux (Snia-IPR), Syndicat national des personnels de direction (SNPDEN), Union des familles laïques (Ufal), Union rationaliste, Unsa éducation.