mardi 16 janvier 2018

La Libre Pensée informe les associations laïques (communiqué FNLP 13/01/2018)

Il est visible aujourd’hui qu’une page est en train de se tourner dans l’histoire du mouvement laïque en France. Une profonde réflexion est en cours dans  les associations laïques. Elle est le produit d’un bilan qui est en train de se tirer sur les cinquante dernières années qui ont vu bien des propos en débat et aussi des contradictions non-résolues.
Une réelle convergence est en train de se faire jour autour des questions essentielles qu’a posées et résolues la loi du 9 décembre 1905 de Séparation des Eglises et de l’Etat. C’est autour de la conception fondamentale qu’il s’agit d’une loi de liberté et non d’interdictions qui met au premier plan la première des libertés, la liberté de conscience,  que l’union laïque peut se refaire.
L’Appel des laïques de décembre 2016 a rencontré un succès indéniable en rassemblant autour de son contenu l’essentiel des associations se réclamant de la défense de la laïcité dans l’ensemble de l’arc-en-ciel des organisations laïques, syndicales, mutualistes, pacifistes qui sont le vivier naturel du mouvement laïque organisé.
La Libre Pensée entend donc continuer à participer à ce mouvement de reconstruction du mouvement laïque sur des bases claires et sans équivoque. Elle se déclare prête, dans le cadre du respect absolu de son indépendance, à poursuivre ce débat et les rencontres nécessaires pour cela.

C’est pourquoi, la Libre Pensée s’interroge

Le problème de l’union se pose, car toutes les associations sont différentes par nature et ont leur propre histoire. Si tout le monde pensait la même chose, la question de l’union ne se poserait pas. Si la Libre Pensée n’a jamais été favorable, et elle l’a montré, à  la « laïcité plurielle », par contre, elle considère que la pluralité du mouvement laïque est un gage de démocratie réelle. Cette pluralité n’est en fait que la liberté de conscience en action.
Vouloir imposer un modèle unique, un « sauveur suprême », un « dogme laïque » est totalement antinomique de ce que porte la laïcité comme pensée, comme système et comme mouvement. Pourtant, on voit  apparaître, ici ou là, quelques tentatives  « d’appels », souvent  confondants, dont le seul objectif est, semble-t-il,  d’essayer, sans succès, d’effacer le succès incontournable de l’Appel des laïques. C’est sans doute l’hommage du vice à la vertu et la rançon de la gloire.
On est aussi en droit de s’interroger sur ce que fait un dénommé Charles Arambourou de l’UFAL qui s’est fait une spécialité de polémiquer avec la terre entière en agonisant d’injures, de procès d’intention, voire de calomnies pures et simples, la quasi-totalité des associations laïques. Dès lors, la question se pose :

Au compte de qui et pourquoi ?
Pourquoi cet acharnement à vouloir diviser les laïques ?

Est-ce dans un souci de clarification ? Il faudrait alors commencer par le commencement,  nous expliquer un tour de passe-passe : Côté Cour, on se déclare Pro-Mélenchon et pour la France insoumise, côté Jardin, on participe à toutes les activités des réseaux de Valls and co dans une conception de la laïcité uniquement tournée contre les musulmans. Et on participe « au collectif laïque » qui n’est qu’un instrument pour promouvoir Manuel Valls, avec le grand succès que l’on connaît.
La Libre Pensée rappelle (et c’est aisément vérifiable) qu’elle n’a jamais  engagé la première,  de polémique contre quiconque. C’est parce qu’elle a été attaquée qu’elle a pu répondre avec force et vigueur parfois. On n’a pu retenir que la réponse de la Libre Pensée, tant elle était pertinente, mais le fait est là : ce n’est pas la Libre Pensée qui organise la polémique. Elle ne fait que la subir.
Elle entend, quand même, répondre à une analyse de droit sur la « laïcité en entreprise », car il s‘agit d’une atteinte liberticide à la liberté de conscience. Le salarié reste un citoyen, même dans l’entreprise. Il n’est pas un « objet-meuble » appartenant au patronat.

La Fédération nationale de la Libre Pensée communique donc tous ces éléments de réflexion aux associations laïques.

Paris, le 13 janvier 2018.

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- - ANNEXE - -

Il ne faudrait pas croire que la Libre Pensée ne va pas défendre ses analyses sur la question de la laïcité dans les entreprises privées. Voici la note explicative de la Commission « Droit et Laïcité » de la FNLP. Celle qui gagne les recours administratifs en matière de défense de la laïcité. Non que Charles Arambourou de l’UFAL en perde. C’est impossible, il n’a jamais fait le moindre recours pour défendre la laïcité, c’est ce qui lui permet sans doute d’avoir un avis sur tout.
L’arrêt du 14 mars 2017 de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), se fondant sur l’article 4, paragraphe 1, de la directive du 27 novembre 2000, considère que l’atteinte à la liberté de conscience d’un salarié ne peut être justifiée que par « une exigence professionnelle essentielle et déterminante ». Si l’employeur n’est pas en mesure d’établir celle-ci, il commet une discrimination directe en lui imposant une obligation contraire à ses convictions. La Cour de cassation a statué dans le même sens dans un arrêt du 22 novembre 2017 à propos du licenciement d’une jeune femme ingénieur d’études portant un foulard.
En cela, implicitement mais nécessairement, ces deux arrêts font écho à celui que la Cour de cassation a rendu le 13 mars 2013 à propos du licenciement de la directrice adjointe de la crèche Baby-Loup. La Cour avait alors jugé que l’atteinte à la liberté de conscience du salarié ne peut être justifiée que « par la nature de la tâche à accomplir » et que les restrictions apportées doivent être « proportionnées au but recherché », conformément à l’article L. 1121-1 du Code du travail.
Par suite, dans l’avenir, en dépit de l’introduction de l’article L. 1321-2-1 du Code du travail par la loi du 6 août 2016, qui permet de limiter les libertés individuelles dans l’entreprise si « […] l'exercice d'autres libertés et droits fondamentaux ou […] les nécessités du bon fonctionnement de l'entreprise […] » le commande et justifie, à cet effet, de prévoir une disposition de restriction dans le Règlement intérieur, le juge judiciaire ne pourra ignorer les décisions de la CJUE et de la Cour de cassation, respectivement de 14 mars et 22 novembre 2017, qui sont mal venues pour tous ceux qui rêvent de pourchasser les musulmans pour des motifs assez inavouables.
L’Union des familles laïques (UFAL) fait donc un mauvais procès à la Fédération nationale de la Libre Pensée (FNLP) en tentant de démontrer que celle-ci aurait mal interprété les arrêts de la CJUE et de la Cour de cassation. Dans sa réponse, elle omet de citer le principe essentiel de nature à fonder une restriction à la liberté de conscience des salariés : « une exigence professionnelle essentielle et déterminante ». Qui sont donc les « censeurs » ? Nous observons d’ailleurs que l’UFAL donne en partie acte à la FNLP de son commentaire des deux arrêts au début de sa réponse et conteste la constitutionnalité de l’article L. 1321-2-1 du Code du travail
Il faut rappeler que la FNLP, dans sa brochure consacrée à l’affaire Baby-Loup, avait précisé qu’en la matière il ne peut y avoir de liberté ni de restriction générales et absolues. Il importe d’apprécier la situation au cas par cas. La sécurité des travailleurs ou l’emploi détenu peuvent, par exemple, justifier des restrictions aux « droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives ». Ces limitations sont légitimes lorsque « la nature de la tâche à accomplir » l’impose et si elles restent « proportionnées au but recherché. » Toute atteinte collective pour d’autres motifs à ces droits fondamentaux constitue une violation des libertés individuelles, quelles que puissent être les contorsions de ceux qui rêvent d’effacer la présence des musulmans de la surface de la terre.
La Libre Pensée rappelle qu’elle obtient satisfaction, in fine, sur plus de 90% des recours qu’elle fait en matière, notamment mais pas exclusivement,  de justice administrative. Elle a modifié, au cours de ces dernières années, de manière substantielle, y compris au plus haut niveau (c’est-à-dire au niveau du Conseil d‘Etat), la jurisprudence en matière de défense de la loi de 1905 et des lois laïques : crèches dans les bâtiments de la République, Vierges sur des emplacements publics, emblèmes religieux (Ploërmel), laïcité dans les cimetières, baux emphytéotiques  pour la construction de bâtiments religieux, reconnaissance du monopôle des diplômes par l’université républicaine, subventions publiques pour des œuvres cultuelles, etc…

Qui d’autre peut se prévaloir d’un tel bilan de défense de la laïcité ?

Adopté à l’unanimité de la CAN de la FNLP, le 14 janvier 2018